Bien concevoir un diaporama : conseils

A l’invitation de Christophe Batier pour l’Université Lyon I, j’ai eu l’occasion de présenter ces conseils de base pour la conception de diaporamas.

Je m’exprime ici comme enseignant et pour des enseignants, non pas spécialement comme enseignant de philosophie. La réflexion critique sur les présentations numériques se porte bien, heureusement, et notamment ici.

Voici le diaporama seul :

10 réflexions au sujet de « Bien concevoir un diaporama : conseils »

  1. Bonjour et merci pour la mise à disposition de cet enregistrement.

    Ci dessous les principaux points que je souhaite questionner.

    1) Le propos développé tourne autour de la notion de la captation de l’attention des étudiants. Il s’agit de les « scotcher ». Pour ce faire, le diaporama ne doit pas reproduire le discours tenu mais l’illustrer, le renforcer… de manière percutante.

    2) Il faut penser communication et pour cela faire la chasse à tout les éléments superflus. Il faut simplifier le contenu pour l’amplifier, le mettre en relief. Epurer le graphisme. Réduire le texte au maximum, un mot peut suffire. On a beaucoup à apprendre des publicitaires.

    3) Les apprenants ne doivent pas lire en même temps qu’ils écoutent, surcharge cognitive nuisible à leur apprentissage.

    4) Un diaporama ne doit pas être un prompteur, ne doit pas être une prise de notes pour l’enseignant.

    5) Le diaporama présente l’avantage de pouvoir peut ensuite être facilement diffusé. Si l’on conçoit un diaporama pour le diffuser, il sera forcément surchargé.

    Questionnements

    Sur 1)
    Le premier point concerne donc la captation de l’attention. Il est certain qu’un apprenant ne peut construire ses connaissances que s’il est attentif mais on peut se demander si le fait d’être scotcher lui permet réellement d’être actif ? Est-ce que l’objectif d’un enseignant est de capter l’attention ? Si oui, cela doit-il aller jusqu’à adopter les recettes des publicitaires ? Ne retrouve-t-on pas là la posture favorite des professeurs charismatiques qui cherchent avant tout à séduire ? Est-ce que la mission première d’un enseignant est de faire adhérer à son discours ? Ne s’agit-il pas plutôt de permettre à l’apprenant d’être en situation de le comprendre et de le questionner ? Un apprenant capté, subjugué, est-il capable de cette prise de recul ? En adoptant une telle démarche fait-on œuvre de pédagogie ou de prosélytisme ?

    Sur 2)
    Simplifier, est certainement une stratégie utile à l’enseignant, elle ne peut être la seule. En effet, la démarche cartésienne de la subdivision du problème en sous-problèmes pour les résoudre un à un et estimer ainsi résoudre le problème en son entier, est, comme l’ont démontré les penseurs de la complexité, largement illusoire. Faut-il donc absolument réduire, et trahir, la complexité d’une notion, d’un concept, par l’utilisation d’un vocabulaire, certes choisi, mais très réduit ?

    Sur 3)
    La surcharge cognitive est certainement un écueil que l’enseignant doit éviter aux apprenants. Toutefois, le renforcement de l’auditif par le visuel, et en partie par la redondance des informations, ne me semble pas être assimilable à la surcharge cognitive. On peut d’ailleurs se demander si la surcharge cognitive n’est pas au contraire, encouragée par le fait que l’apprenant sera capté et non réflexif (cf. plus haut). Diffuser une information simultanément de manière orale et visuelle permet de rejoindre les apprenants dans leurs préférences cognitives.

    Sur 4)
    Si le diaporama n’a pas à être un prompteur, il est moins certain qu’il ne puisse pas correspondre à une prise de notes. D’ailleurs, un bel écran, épuré avec une image plaisante et parlante agrémentée de deux ou trois mots, n’est-ce pas la prise de notes idéale pour l’enseignant ? L’écran ne parle-til pas d’abord à celui qui l’a créé ? Il est aussi probable que le contenu et la forme d’un diaporama soit directement liés à l’usage que l’on en fait. Il peut servir de support au discours de l’enseignant mais également constituer une ressource de cours, une trace qui permette à l’apprenant de revenir sur telle ou telle partie du cours. Les principes énoncés dans cette vidéo se concentrent uniquement sur l’usage comme support à l’oral.

    Sur 5)
    C’est bien relativement aux usages que se noue une contradiction. Diffuser ou ne pas diffuser ? Si l’on respecte les principes énoncés, il y a fort à parier que la personne qui visualisera le diaporama en l’absence du discours, n’apprendra que peu de choses mais pourra éprouver la satisfaction d’avoir vu un bel objet graphique. Si le diaporama est conçu pour la diffusion, il doit pouvoir se suffire à lui-même et donc incarner le discours qui ne peut alors se réduire à quelques images et mots. La présence importante de texte dans un diaporama est un inconvénient pour son utilisation en cours mais de manière moindre pour celui qui le visualise à temps choisi et au rythme qu’il souhaite. Ne faudrait-il donc pas distinguer les différents usages du diaporama et les principes en matière de conception et de réalisation qui prévalent pour chacun de ces usages ? N’est-il pas réducteur de ne considérer le diaporama comme ne servant qu’au support d’un discours oral ?

    Encore merci pour cette vidéo qui m’a permis de nourrir ma réflexion sur les pratiques du diaporama.

    Au plaisir d’échanger,
    Jacques Rodet

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    • Merci pour cette synthèse claire et ces commentaires nourris !

      Je dois sans doute mieux cadrer mon propos : je ne pratique pas ni ne préconise l’usage systématique des présentations visuelles. Il s’agit seulement de soutenir certaines séquen…ces de cours, plus magistrales et transmissives. Dans ce cas, le soutien d’un support permettant d’accrocher l’attention est utile.

      Sur 1.
      La formule « scotcher » les élèves n’est peut-être pas très heureuse. Elle semble en effet mettre en veille la pensée, comme vous le soulignez.
      Mais je maintiens la nécessité d’user de ressorts rhétoriques pour capter l’attention. Ces ressorts ont toujours fait l’objet d’une grande attention dans la tradition rhétorique occidentale, notamment à travers la « captatio benevolentiæ », qui peut s’étendre à tout le discours.
      Pour ce qui est des recettes des publicitaires, elles sont bien souvent elles-mêmes les recettes les plus classiques de la rhétorique. Elles dépassent en ce sens la publicité. Il faut évidemment cependant se garder des sophismes et des amalgames publicitaires (ce que Aristote réprouvait comme le fait de « plaider hors de la cause »).
      Je pense donc qu’il y a bien un élément de séduction dans l’enseignement, mais aussi une éthique et une exigence intellectuelle, — heureusement !

      Le questionnement des élèves est bien entendu suscité, mais pas forcément dans le moment de l’exposé (le « cours magistral »).

      Sur 2.
      La simplification risque d’être simplificatrice, en effet. Je crois néanmoins que la recherche de la formule synthétique est utile pour la mémorisation, mais aussi pour la compréhension : elle revient à se demander ce qui, au fond, est l’essentiel. Je pense ici au tetrapharmakon de l’épicurisme… Le sens du complexe et des nuances est bien entendu cultivé dans le cours de philosophie.

      Sur 3.
      Sur cette question de la surcharge cognitive, je ne peux trop m’avancer (c’est au fond une question de psychologie cognitive, non ?). Votre position est intéressante ici.

      Sur 4.
      Certes l’écran parle d’abord à celui qui l’a créé, — même s’il a vocation à être compris par les élèves. Il me sert de fait, non pas de prompteur exhaustif, mais de guide.
      Le diaporama peut servir de trace pour l’élève, sans toutefois remplacer la richesse des notes personnelles.

      Sur 5.
      Vous relevez bien une ambiguïté de mon propos : je navigue entre le diaporama délivré en classe et le diaporama autonome, délivré sur les réseaux numériques.
      Si je souligne que le diaporama doit être conçu pour ne servir que d’accompagnement du propos oral, c’est pour prévenir le danger des diaporamas surchargés de textes.
      Mais il est vrai que j’aspire personnellement à concevoir des diaporamas pouvant être aussi intelligibles par eux-mêmes. Dans ma pratique, je tente de tenir la corde entre les deux.

      Vos commentaires me permettent de mieux réfléchir à ce que je fais : merci ! Tout feedback est précieux.

      PS : pourrait-on publier cet échange sur un site extérieur à Facebook, pour générer d’autres réactions ?

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  2. Bonjour !

    Ce que vous décrivez recoupe bon nombre de mes lectures quant aux conseils relatifs à la conception d’un diaporama.

    J’avais eu l’occasion de regarder Garr Reynolds, l’auteur sur lequel vous vous appuyez (http://msieursvp.blogspot.com/2008/08/lart-de-la-prsentation-comment-captiver.html).

    Depuis, j’ai tenté d’utiliser les diaporamas pour introduire mes cours, dans un souci d’autonomisation des mes apprenants : chacun pouvait visualiser le diaporama à son rythme, ce dernier présentant toutes les notions et toutes les étapes constitutives de l’activité pédagogique introduite.

    J’ai rapidement constaté que mes apprenants n’en retiraient rien, ils étaient passifs : j’ai tenté de corriger le tir en introduisant un quiz à l’issue du diaporama…
    Pas mieux, aussitôt lu, aussitôt oublié !

    Par la suite, j’ai tenté de « recycler » mes diaporamas en support de cours : mes apprenants ont quasiment tous soulignés le manque de praticité de ce format pour réviser !

    Bref, si je suis persuadé de l’utilité d’un diaporama dans une situation où il est nécessaire de convaincre un auditoire, j’ai de sérieux doute quant à son utilité pédagogique…

    Depuis, j’introduis mes activités pédagogiques par un Brain-Storming durant lequel je bâtis une carte heuristique où chacun a participé. (Cf. ce document : https://docs.google.com/viewer?a=v&pid=explorer&chrome=true&srcid=0B213TUaERolBNmE0OThhOTgtNDU4OS00YWM4LTkxYmItMjk4ODE5NDY1NWEy&hl=fr)

    Les apprenants peuvent se référer à la carte lorsqu’ils travaillent, puis comme support de cours.
    L’aspect dynamique de la carte (possibilité de plier/déplier une ou plusieurs branches) leur permet de visualiser ce qui les intéressent sans pour autant perdre de vue la globalité.

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  3. Bonjour Gaël,

    Le diaporama est en effet un soutien de la « présentation » ou, plus simplement, du propos. C’est selon moi un assez bon support de cours, mais ce n’est certainement pas le support idéal pour un document de révision.
    J’attends de mes élèves qu’ils révisent d’abord avec leurs notes de cours (que je tente d’ailleurs de produire collaborativement cette année : http://sites.google.com/site/coursdephilosophie/livres-de-bord/prises-de-notes-collaboratives).

    Comme soutien du propos, le diaporama a selon moi une utilité pédagogique. Et puis n’est-il pas nécessaire aussi en pédagogie de convaincre son auditoire ?

    Quant à la production des cartes d’idées par un remue-méninges collectif, je trouve cela formidable !
    Je pense que la carte d’idées constitue, en effet, un excellent support de révision. J’ai tenté cela en produisant des cartes de philosophie pour les éditions Hatier : http://www.annabac.com/parcoursphilo.php

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  4. Ping : relation, transformation, partage - Lu cette semaine (weekly)

  5. Carte, diaporama, forum, blogue, baladodiffusion…

    Je trouve étrange cette quête de l’outil universel. C’est comme si un ouvrier cherchait à faire tous ses travaux uniquement avec une perceuse. Il viendra bien vite le moment où il se rendra compte que pour planter un clou ou pour scier une planche, il y a de bien meilleurs outils de la perceuse !

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  6. Ping : Des conseils sur comment concevoir un diaporama techno-pedagogique – par François Jourde « Mister C's Course Companion Site

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